À Antran, la mairie redonne vie à son bar-restaurant

Mais pour bien comprendre comment un tel lieu de convivialité a repris vie, un petit retour en arrière s’impose. « La commune a toujours connu un bar à cet endroit. C’était le poumon social de la commune, explique Claude Marchaisseau, adjoint au Maire, en charge de la communication et de la solidarité. L’établissement connaissait un vrai succès avec sa salle en arrière-cours, où se déroulaient les repas de famille, les rendez-vous des clubs sportifs, les mariages… Cependant, le lieu n’ayant jamais connu de travaux d’aménagement, au fil du temps l’activité a périclité. Les différents gérants, à partir de 2010, se sont succédés sans arriver à trouver un équilibre financier. L’endroit était une véritable passoire thermique et les salles avaient besoin d’être rénovées. » Le propriétaire des murs ne trouvant pas de repreneur, le bar-restaurant a fermé définitivement en 2020. 
Pour les élus de la commune, il n’était pas pensable de perdre le dernier commerce, après avoir connu, il y a quelques années la fermeture de la boulangerie, transformée en logements. « C’était important de garder au centre du village un lieu, où les habitants puissent se rencontrer, et passer du bon temps », note Patrick Cabaret, adjoint au Maire en charge de la commission des finances. La municipalité a donc fait le choix  d’acheter les locaux en 2021. Une décision prise à l’unanimité malgré des doutes de certains élus sur la totalité de la rénovation. « C’était un gros enjeu financier, sans avoir vraiment la certitude de la réussite du projet. » Dès la conception du cahier des charges, les élus ont cherché des financements et ont su fédérer les partenaires publics. Le projet a bénéficié de 80 % de subventions, notamment de la Région Nouvelle- Aquitaine, sur un budget total de 1,3 millions d'euros. « Nous étions sur une période post-covid, nous avons pu bénéficier de subventions de relance de l’activité. » 
 

Dans le même temps, avant que les travaux ne commencent, les élus ont visité plusieurs établissements pour se projeter sur les meilleures options d’aménagements. 
Autre grosse priorité : trouver très vite des futurs repreneurs intéressés à venir s’installer dans la durée sur la commune. « Avec un objectif : responsabiliser les repreneurs, poursuit Claude Marchaisseau. Contrairement à certaines communes qui salarient des gérants, nous voulions des personnes investies dans le projet et qui puissent s’exprimer selon leurs envies, d’où le choix de la gérance. Pour faciliter le démarrage de l’activité, nous avons mise en place un loyer graduel la première année. »  
Pour trouver la perle rare, ils sont passés par plusieurs canaux : SOS villages, proposés par TF1, mais aussi le service du développement de commerces de la communauté d'agglomération du Grand Châtellerault. Une candidature est très vite sortie du lot, via SOS Village, celle de Chloé Frayssens et Théo Charbonnel, restaurateurs en Dordogne qui cherchaient à s’installer ailleurs du fait d’un établissement inadapté à leurs envies de développement. 
 

Ce qui les a séduits en premier dans ce projet : la réhabilitation complète du bâtiment. Tous les espaces ont été réaménagés et l’isolation a été entièrement refaite. La grande salle à l’arrière du bar-restaurant, également entièrement rénovée, qui était indépendante, a été connectée à celui-ci par un couloir permettant d’aménager des sanitaires, des cuisines, aux normes d’hygiène et d’accessibilité.
« Ce qui offre des conditions de travail optimales lorsque nous organisons une réception », souligne Chloé. Autre atout, les équipements de cuisine sont flambant neufs. « Quand nous sommes venus la première fois pour visiter, nous avons tout de suite jugé qu’il y avait un vrai potentiel. Par l’emplacement au cœur du village avec la sortie d’autoroute et les zones d’activité à proximité. Depuis toute petite je baigne dans ce milieu, mon père était restaurateur, j’ai le nez pour ça », sourit Chloé. Et cerise sur le gâteau, qui a aussi été un atout décisif : un logement entièrement rénové (un T3) pour les gérants situé juste au-dessus du bar. 

Avant l’ouverture de leur futur établissement, Chloé et Théo ont souhaité s’imprégner de la vie de la commune en participant notamment au café citoyen qui avait été mis en place les vendredis matins, jour du marché local, depuis la fermeture du bar-restaurant. Ce qui leur a permis très vite de s’intégrer à la population, mais aussi de pouvoir adapter, selon leurs goûts, certains aménagements avant la fin des travaux. 
La convivialité, qu’ils ont su insuffler à La Croisée des Fourchettes, s’accompagne aussi d’un vrai professionnalisme dans la cuisine qu’ils proposent : des plats conçus avec des produits de saison dans un esprit "bistrot" généreux et savoureux et tout à fait abordable financièrement. Chaque midi, ils mettent à la carte un repas complet ouvrier et le soir des plats plus élaborés. Et sur réservation, car la réussite est telle que régulièrement l’établissement fait le plein. D’ailleurs les deux gérants vont prochainement recruter un apprenti en cuisine et un ou une salariée pour le service en salle. Pari réussi !