Dans le cadre d’une politique territoriale solidaire et co-construite, la Région réalise des diagnostics territoriaux qu’elle partage avec les acteurs concernés pour mettre en évidence la capacité des territoires à se développer et à capitaliser sur ce potentiel.
Un territoire rural, faiblement polarisé, mais innovant
Situé au sud de la Charente-Maritime, entre Cognaçais et Bordelais, au contact de 3 autres départements (Charente, Dordogne et Gironde), le territoire de contractualisation de la Haute Saintonge est composé de la communauté de communes du même nom, la plus étendue de France (1 760 km²). En 2014, ses 129 communes comptent près de 67 800 habitants.
Territoire rural peu dense, il est organisé autour de deux pôles principaux situés dans la moitié nord, Jonzac et Pons (respectivement 4 700 et 2 700 emplois en 2014), et de la commune de Montendre dans la moitié sud (1 400 emplois). Ces 3 pôles réunis ne concentrent que 19 % de la population et 39 % des emplois du territoire.
Ils constituent également des pôles d’équipement qui, avec les communes de Mirambeau et Monguyon, animent cinq bassins de vie. Relayés par 19 pôles d’équipement de proximité, ils assurent aux habitants de la Haute-Saintonge l’accès aux équipements les plus courants. Jonzac a rang de pôle d’équipement de la gamme supérieure, en offrant 29 des 47 types d’équipement de cette gamme, parmi lesquels un hypermarché, deux lycées, un centre hospitalier, un cinéma.
La Haute-Saintonge bénéficie d’infrastructures de transport routières et ferroviaires structurantes. L’A10 et la N10 mettent ainsi le territoire à 40 ou 50 minutes des agglomérations de Saintes, Cognac ou Angoulême et 1h15 de Bordeaux. Sept gares ou haltes ferroviaires sont desservies par TER, et celles de Jonzac et Pons par les Intercités Nantes-Bordeaux.
Le territoire a engagé des démarches innovantes : il est lauréat de l’appel à projet TEPos (Territoire à Energie Positive) et TEPosCV (Territoire à Energie Positive pour la Croissance Verte). Il est reconnu également comme Pôle d’Excellence Rurale autour du thème « valoriser l’environnement, moteur du développement économique » et s’est engagé dans un programme d’écologie industrielle et territoriale.
Une économie à dominante productive
Le tissu économique haut-saintongeais a enregistré, comme partout, une véritable mutation depuis les années 70. Dans ce territoire, elle résulte d’une poussée significative de l’économie présentielle, tournée vers la satisfaction des populations résidentes et des touristes, et d’un effondrement de la sphère productive. La sphère présentielle, poussée par la consommation locale, s’est en effet développée à un rythme beaucoup plus soutenu que dans les territoires de contractualisation
néo-aquitains ruraux, tout en restant inférieur à la progression régionale et nationale. A l’inverse, la sphère productive exportatrice, largement prédominante en 1975, a subi des pertes 2,5 fois plus importantes qu’au niveau régional et national, mais moins marquées que dans les territoires ruraux. Ainsi, la sphère productive, alors qu’elle concentrait 61 % des emplois en 1975, n’en représente plus que 38 % en 2014, mais elle reste un pilier essentiel de l’économie, davantage représenté qu’en province (34 %).
Le tissu économique local reste en effet spécialisé dans des secteurs industriels tels que les industries du bois-papier-imprimerie, la fabrication de machines et équipements, les industries agroalimentaires. La Haute-Saintonge est également spécialisée dans les industries extractives avec une trentaine de carrières actives en 2014. Le poids important de l’agriculture qui caractérise le territoire (15 % de l’emploi en 2014) contribue également à la surreprésentation de la sphère productive. Les productions agricoles sont à forte dominante viticole dans le quart nord-est du territoire qui relève du terroir de l’AOC Cognac, et le long de l’estuaire. Elles sont plus diverses sur une dorsale de polyculture- polyélevage, notamment le long de la vallée de la Seugne. La sylviculture est également très présente sur le territoire, alimentant une filière industrielle de sciage/travail et transformation du bois. Cette dernière, initialement tournée vers la tonnellerie et la merranderie pour la vinification et l’élevage du Cognac, s’ouvre désormais à la production de bois-énergie (projet Saintongebois).
Parmi les spécialisations du tissu économique, ressortent également deux secteurs d’activités majoritairement présentielles : l’hébergement médico-social et action sociale et la construction (qui concentrent respectivement 10 % et 8 % de l’emploi salarié). L’économie sociale et solidaire occupe une place limitée sur ce territoire, en employant 10 % des salariés, contre 12 % en Nouvelle-Aquitaine.
Une économie qui peine à rebondir suite à la crise
La Haute-Saintonge a mieux résisté que la moyenne des territoires ruraux à la « grande récession » initiée en 2008 par la crise financière internationale. Après avoir subi des pertes d’emploi salarié relativement modérées sur la période 2008- 2014, guère plus importantes qu’au niveau national, elle ne bénéficie pas de la période de reprise 2014-2016, et continue à perdre des emplois.
Ainsi, entre 2008 et 2016, l’emploi salarié privé a reculé de 4,5 %, soit 450 emplois perdus. Ces pertes s’expliquent essentiellement par l’orientation sectorielle du tissu économique, plutôt spécialisé dans des secteurs en difficulté au niveau national. Les secteurs de la construction, de la fabrication de machine et équipements, du transport et de l’entreposage, des industries extractives concentrent les pertes d’emploi salarié les plus massives. A l’inverse, les secteurs hébergement-restauration et services aux entreprises sont les activités qui créent le plus d’emplois sur la période. Ils sont mieux orientés qu’en province.
Signe positif, la Haute Saintonge se montre dynamique en matière de création d’établissements. Sur la période 2011-2016, le taux de création d’établissements est constamment supérieur à celui des territoires ruraux néo-aquitains et rejoint le taux moyen de province en 2016. Le dynamisme de création est particulièrement soutenu dans les services marchands aux entreprises comme aux ménages.
Des fragilités sociales
De nombreux signaux témoignent de difficultés sociales : bas niveau de vie et niveau de qualification, facteurs aggravants de santé, précarité de l’emploi et chômage. Le niveau de vie médian des ménages dans la moyenne des territoires ruraux, est inférieur de 1 700 € à celui des ménages néo-aquitains. Le taux de pauvreté est aussi élevé qu’en moyenne dans les territoires ruraux : 16,8 % des ménages vivent au-dessous du seuil de pauvreté en 2015.
Le niveau de qualification de la population est faible : 40 % des habitants ne disposent pas d’un diplôme qualifiant. Le CAP-BEP est de loin le diplôme le plus répandu. Plus rares que dans les territoires ruraux sont les titulaires d’un baccalauréat ou d’un diplôme de l’enseignement supérieur, quelle que soit la tranche d’âge, alors que l’offre de formation initiale est relativement fournie. Sont implantés sur le territoire quatre lycées dont deux agricoles, un CFA et trois Maisons Familiales et Rurales, des formations supérieures sont offertes localement, dont 4 BTS et une licence professionnelle, en complément de celles qui sont accessibles dans un environnement proche. Bien que le niveau de qualification s’améliore, il a moins progressé entre 1999 et 2014 que dans les territoires comparables.
La situation en termes de santé publique est critique. La prévalence de la population aux décès prématurés (avant 65 ans) y est relativement élevée, tout comme celle des jeunes aux affections longue durée. Si le territoire bénéficie de la présence d’établissements hospitaliers, la densité en professionnels de santé y reste faible. Ainsi l’indice de développement humain, qui synthétise la situation du territoire au regard des trois dimensions, niveau de vie, éducation et santé, est parmi les moins favorables des EPCI de Nouvelle-Aquitaine.
De plus, la précarité de l’emploi est prononcée : les actifs en emploi travaillent plus souvent à temps partiel que dans les territoires ruraux et sont plus souvent sous contrat précaire. Les CDD et contrats aidés sont en particulier plus nombreux. Enfin, le taux de chômage est sensiblement plus élevé. Il est également supérieur au taux régional, bien que s’étant légèrement moins accru entre 1999 et 2014 que dans la région. Les femmes et les jeunes sont plus exposés au chômage que dans les territoires de référence.
Un réel déficit de captation de richesses mais un système de consommation vertueux
Au vu de la composition des revenus productifs/sociaux/publics/résidentiels qu’elle capte en provenance de l’extérieur, la Haute Saintonge présente un modèle de développement « productif – social » et un déficit marqué de captation de revenus. Les revenus productifs exportateurs, nettement surreprésentés dans le processus de captation de revenus, restent primordiaux. Ils constituent une force pour le territoire, leur amenuisement une fragilité qui contribue à réduire la captation de richesses. Les difficultés que rencontre la sphère productive influent aussi sur la montée en puissance des revenus sociaux, qui, en cohérence avec les fragilités sociales évoquées, sont également surreprésentés sur le territoire.
La part occupée par les revenus résidentiels est inférieure à celle qu’ils enregistrent dans les territoires ruraux de comparaison. Cela en raison notamment d’un déficit marqué de captation de revenus touristiques. La densité d’hébergement touristique, qu’il soit marchand, ou non-marchand (résidences secondaires), est en effet deux fois moindre que dans les territoires ruraux.
Pour autant, la Haute-Saintonge présente un signe de diversification de la base résidentielle. Aux côtés des pensions de retraite qui ont un poids significatif proche de la moyenne des territoires ruraux (31,1 % des revenus captés), les revenus pendulaires, importés par les actifs du territoire qui résident sur le territoire et travaillent en dehors de celui-ci occupent une place légèrement plus importante que dans les territoires ruraux. La Haute-Saintonge tire en effet profit de sa situation géographique entre les agglomérations de Cognac, Saintes, Libourne, et la métropole bordelaise, territoires qui attirent à eux seuls la moitié des flux sortants d’actifs haut-saintongeais. Plus largement, le bilan des transferts de revenus occasionnés par les déplacements domicile-travail inter-territoriaux est positif. Les actifs qui résident dans le territoire et en sortent pour travailler, engendrant une captation de revenus pour la Haute-Saintonge, sont près de 2 fois plus nombreux que ceux qui résident à l’extérieur et entrent sur le territoire pour travailler, et qui occasionnent à l’inverse une évasion de revenus.
Bien que la Haute-Saintonge présente un déficit global de captation de revenus extérieurs, elle semble parvenir à en compenser les effets sur la création d’emplois présentiels privés par un système de consommation plutôt favorable. Elle bénéficie en effet d’une meilleure propension à consommer localement que la moyenne des territoires ruraux. Ainsi, la densité d’emplois présentiels en Haute Saintonge est supérieure à celle des territoires ruraux.
Des marges de développement
Si les activités productives exportatrices continuent de perdre des emplois, la place essentielle qu’elles occupent dans le processus de captation de revenus et la production de valeur ajoutée dont elles sont porteuses méritent qu’elles soient relancées. La présence de pépites (ex Survitec-Zodiac spécialisée dans la mécanique de sécurité), la dynamique territoriale émergente en matière de mobilité durable, ainsi que de production d’énergies renouvelables, à la faveur des ressources géothermiques (réseaux de chaleur de Jonzac et Pons) et des opportunités de développement du bois-énergie, constituent des atouts. Les mutations environnementales et sociétales auxquelles l’agriculture est confrontée représentent un défi pour ce territoire à forte vocation agricole qui a encore peu développé de circuits courts.
La place qu’occupent les revenus pendulaires amorce une diversification salutaire des bases de revenus. Leur développement doit cependant être pensé à l’aune des modes de déplacement et du renchérissement du prix des carburants pour être soutenable sur le plan environnemental et social. Sont en jeu la maîtrise des émissions de gaz à effet de serre et le risque de précarité énergétique.
Une autre source de diversification et d’équilibrage du modèle de développement réside dans le développement des activités touristiques du territoire. La Haute- Saintonge possède probablement des marges de progression par la promotion d’un ensemble d’aménités : une offre thermale récente, un patrimoine naturel varié (estuaire, rivières, forêts), un patrimoine architectural, gastronomique et viticole, des infrastructures d’itinérance douce, une offre festivalière fournie mais méconnue. Le territoire est par ailleurs desservi par des infrastructures de qualité, qui ouvrent des pistes de développement pour un tourisme de proximité, à destination de la clientèle de la métropole bordelaise notamment, ainsi que pour une clientèle plus distante. Le développement touristique de la Haute-Saintonge passe aussi par la qualification de l’offre d’hébergement marchand : parmi les 18 hôtels et 15 campings que compte le territoire, plus de la moitié ne sont actuellement pas classés.
Une attractivité et un dynamisme démographique soutenus
Si l’attractivité touristique reste à asseoir, l’attractivité démographique du territoire s’affirme accompagnée de ses bienfaits : renouvellement de la ressource en main d’œuvre, limitation du vieillissement de la population, dynamisation de la consommation locale et donc de l’économie présentielle … Sous l’effet d’un solde migratoire largement excédentaire depuis le début des années 2000, supérieur à celui des territoires de comparaison, la population s’accroît en effet à un rythme soutenu, après une longue période de déprise. Ainsi en 2014, le territoire retrouve quasiment son niveau de population de 1968. Cette dynamique est à peine freinée par un déficit naturel moindre que dans les territoires ruraux.
La Haute-Saintonge présente un profil démographique intermédiaire entre celui des territoires ruraux et celui de Nouvelle-Aquitaine. Le vieillissement de sa population reste mesuré, avec une proportion de moins de 30 ans plus élevée que dans les territoires ruraux et une moindre part des plus de 75 ans. La Haute Saintonge compte en proportion autant d’enfants de moins de 15 ans que la Nouvelle-Aquitaine.
Le regain démographique s’accompagne d’un plus fort renouvellement du parc de logements que dans les territoires ruraux. La progression du taux de vacance des logements et son niveau élevé sont cependant révélateurs de l’inadéquation d’une part croissante du parc aux besoins de la population (confort, taille, obsolescence). Avec 57 % des résidences principales construites avant les premières réglementations thermiques (1970), le risque de précarité énergétique reste par ailleurs élevé au regard du niveau de revenu des ménages.
La préservation de l’attractivité du territoire pour de nouveaux arrivants et l’amélioration des conditions de vie des habitants, tout comme le développement de l’attractivité touristique appellent une amélioration du niveau d’équipements. Il s’avère en effet restreint dans toutes les gammes, des équipements les plus courants aux équipements de la gamme supérieure. Bien doté en équipements sportifs, culturels et de loisirs, la Haute-Saintonge l’est beaucoup moins en équipements de santé, domaine qui apparaît prioritaire au regard de l’état de santé de la population.
Quatre enjeux déterminants pour le territoire
Consolider la sphère productive du territoire
La sphère productive, qu’elle soit agricole ou industrielle, constitue un atout maître du territoire qu’il s’agit de consolider en structurant et améliorant l’écosystème local, et notamment en renforçant des filières existantes, tout en prenant en compte l’approche durable de ces activités. L’émergence de nouvelles filières vertes prometteuses (véhicules électriques de sports mécaniques ; traitement des végétaux et animaux à base de produits naturels) doit également être encouragée.
Valoriser la Haute-Saintonge en tant que territoire pionnier en matière énergétique
La Haute-Saintonge qui s’est engagée très tôt en faveur des énergies renouvelables (filière bois, maison de chaleur, solaire, géothermique, photovoltaïque) souhaite poursuivre les travaux engagés en partenariat avec les acteurs existant à l’échelle régionale. Pour ce « territoire interface », irrigué par des infrastructures majeures et traversé par d’intenses flux, le développement de l’intermodalité et de la mobilité électrique constituent des priorités en termes de politiques mobilité.
Maintenir la forte attractivité
Mais aussi développer en agissant sur le cadre de vie et soutenir l’économie présentielle. Cet enjeu renvoie au maintien des commerces mais aussi à une offre de services accrue, tant en volume qu’en qualité, et passe par une revitalisation des centres-bourgs qui animent le territoire. Au vu du diagnostic, l’offre locale de santé de proximité se doit d’être renforcée par la poursuite du déploiement de maisons de santé. L’animation culturelle constitue elle aussi un facteur d’attractivité et de bien- être, susceptible de favoriser la consommation locale.
L’attractivité de la Haute-Saintonge est aussi à stimuler sur un plan touristique afin qu’elle tire bénéfice de ses nombreuses aménités. Parmi celles-ci, le développement du secteur thermal en constitue un enjeu central.
Améliorer la qualification des actifs et l’insertion professionnelle des personnes en difficultés
Ce point semble primordial au vu de la situation sociale rencontrée par les habitants du territoire. Cela ne peut que renforcer l’économie présentielle et productive permettant aux hauts saintongeais de travailler sur leur territoire. Une meilleure adéquation des besoins de formation et des postes proposés doit être recherchée. Le développement de l’ESS constitue une piste à creuser.