À Sarlat, en Dordogne, le site de France Tabac va connaître une seconde jeunesse : il va être reconverti en pôle dédié au cinéma.
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C’est un site aux dimensions hors normes, vieux de près d’un siècle. Une institution dans le tissu industriel de Sarlat, délaissée depuis 2015 et totalement vide depuis 2018. France Tabac, ancienne propriété de la Seita, lieu de stockage et de transformation des feuilles de tabac récoltées dans la région, s’apprête à connaître une nouvelle jeunesse.
La grande fabrique de l'image
Le projet de réhabilitation imaginé par l’association périgourdine Ciné Passion fait partie des lauréats du plan de relance France 2030, dans le cadre de « la Grande Fabrique de l’image », dédié aux studios de tournage, aux studios de production numérique et à la formation aux métiers de l’image. Il faut dire que les bâtiments, bien que centenaires, présentent la prouesse d’être particulièrement sains et en bon état, bien ventilés et dépourvus d’amiante. Et il y a ces volumes : 26 000 m2 de bâtiments couverts, à un jet de pierre du centre-ville médiéval de Sarlat et à deux pas de l’échangeur autoroutier.
Une accessibilité plébiscitée alors que l’industrie du cinéma, trop contrainte par le manque d’espace en région parisienne, cherche à se développer. De vastes studios Le premier pilier du projet sarladais repose sur la création de studios de tournage, devenue nécessaire alors que la France en compte dix fois moins que ses voisins européens, dans un bâtiment métallique de 2 500 m2 appelé à être démonté en partie.
© France Tabac
Espaces modulaires et formation de main d'oeuvre
Objectif : créer un espace en vase clos disposant de 15 mètres de hauteur, autour duquel des espaces modulaires abriteront la régie, des bureaux ou encore une cantine, le tout réalisé en matériaux recyclés. Accolé à ce premier bâtiment, un deuxième, de 2 500 m2 également, hébergera à terme une école publique. Le deuxième axe du projet concerne en effet la formation d’une main d’œuvre qualifiée dans tous les métiers techniques qui gravitent autour d’un tournage : décoration avec la filière bois, métallerie pour la machinerie, métiers relatifs à l’électricité ou encore tout ce qui touche à l’habillage, le maquillage et la coiffure. Les studios attenants serviront, eux, de lieu d’application concrète des enseignements.
Une ressourcerie unique
Reste enfin un troisième bâtiment, pour un troisième projet totalement tourné vers une économie responsable et décarbonée : il s'agit de transformer l’énorme séchoir de 1 500 m2 sur quatre niveaux (soit 6 000 m2 au total) en matériothèque. Autrement dit, une ressourcerie destinée à stocker puis désassembler les décors des productions tournées dans le sud-ouest de la France, afin qu’ils soient réutilisés à volonté, aussi bien par les élèves de l’école que pour les futurs tournages dans la région. Il s’agirait d’un site unique en France : la seule ressourcerie actuellement existante se trouve à Paris et ne dépasse pas les 300 m2… Un lieu bientôt incontournable alors que le CNC (Centre national du cinéma) envisage d’éco-conditionnaliser ses aides dans un futur proche. Le cinéma demeure en effet une industrie polluante, en raison des matériaux utilisés et de la mobilité engendrée. À la fois cohérent, vertueux et concret, porté sur un territoire relativement pauvre et aux faibles perspectives professionnelles pour les jeunes, le projet France Tabac devrait voir le jour en 2027 dans sa version globale, sûrement plus tôt pour la ressourcerie.
Si l’idée d’utiliser les vastes espaces de France Tabac ne date pas d’hier, elle a bénéficié d’une étincelle en 2019, lors du tournage du film Le Dernier Duel de Ridley
Scott, avec notamment Matt Damon. Le tournage nécessitait une base logistique pour assembler des décors et on proposa au réalisateur britannique d’utiliser les hangars du site sarladais, suffisamment spacieux pour servir également de lieu de répétition pour les combats d’épée. La présence, pendant onze jours, de toute l’équipe de tournage permit en outre la réouverture des hôtels du coin en pleine basse saison, sans oublier l’activité générée notamment chez les restaurateurs. En tout, des retombées de l’ordre de 17 millions d’euros qui ont fini de convaincre que l’intérêt n’était pas seulement culturel, mais aussi économique.