C’est un projet très ambitieux qui a vu le jour en juillet dernier sur un des plus beaux villages de France, la petite commune corrézienne de Ségur-le-Château. La Ruelle est un nouveau tiers-lieu, avec deux vocations : porter un développement économique local et installer une proposition culturelle.
© Patrick Meneyrol
Au cœur de ce village d’à peine 200 âmes, lové le long des eaux calmes de l’Auvézère, et classé parmi les plus beaux villages de France, La Ruelle ressemble à une ruche. Cette ancienne forge du 17e siècle est devenue, grâce à la volonté et à l’investissement de quatre trentenaires, un véritable lieu de vie. Sa naissance de La Ruelle sera récompensée les 14 et 15 novembre prochains à Angers par le prix Leader Nouvelle-Aquitaine lors du congrès national des territoires engagés dans la démarche européenne Leader.
Coup de coeur pour Ségur !
Célia Duport, Jovanna Sakovic, Kevin Maury et Tony Berraud se sont connus durant leurs études. Ces globe-trotters qui ont parcouru le monde pour leurs différentes activités ont décidé de poser leurs valises à Ségur-le-Château il y a un peu plus de 2 ans, à la suite de la rencontre en Iran d’une jeune femme originaire du village et qui leur a fait découvrir les charmes de cette bourgade dont l’histoire remonte à la nuit des temps. C’est le coup de cœur ! Nos quatre jeunes lâchent leurs différentes occupations et décident de s’investir en tentant de développer un modèle économique qui réponde aux besoins de Ségur.
Le but, explique Kevin, l’un des fondateurs de La Ruelle, « est de proposer des possibilités de diversification économique sur ce territoire consacré essentiellement à l’agriculture et au tourisme ».
Leurs cursus sont différents, mais quelque part complémentaires. L’un a fait du droit et Sciences-Po. Un autre a son père dans la restauration. Une autre a fait beaucoup de petits boulots comme serveuse. Enfin le dernier a des compétences de maraîcher.
© Patrick Meneyrol
L’idée est venue naturellement.
En 2018, l’épicerie du village est contrainte de fermer. C’était le dernier commerce ouvert toute l’année. Des habitants décident alors de lancer un projet pour maintenir cette activité mais ce n’est pas simple. Nos quatre jeunes amoureux des lieux, qui entre-temps ont acheté un bâtiment qu’ils ont rénové dans le village, décident de le mettre à disposition d’une coopérative regroupant 35 villageois et 4 associations. « On avait vraiment envie que ce village revive et bien que nous soyons dans la coopérative, c’est un peu du mécénat que l’on fait », explique Kevin.
La maison en question, une ancienne forge, est devenue aujourd’hui un café-restaurant-brasserie qui sera ouvert à l’année midi et soir à laquelle s’ajoute une offre de spectacles, du théâtre et de concerts une fois par semaine. Il y est organisé également des soirées thématiques autour de jeux de société ou de la retransmission d’évènements sportifs importants. « L’essentiel », explique Kevin « est de donner aux gens des opportunités de se retrouver et de partager des moments agréables dans un endroit chaleureux, de ne pas être isolés, d’autant plus durant l’automne et l’hiver qui sont, ici, des saisons un peu difficiles ». D’autres soirées sont également organisées « hors les murs » sur le champ de foire ou au château. Une première phase de développement toute neuve mais qui a déjà tenu ses promesses cet été avec une fréquentation non négligeable pour un équipement ouvert seulement début juillet.
Une seconde phase de développement
La deuxième phase est déjà lancée. Elle devrait se concrétiser début 2024. Pour cela, deux bâtiments voisins ont été achetés par la coopérative. Après quelques travaux de rénovation, ils abriteront une boutique épicerie de produits locaux et un espace de coworking. Le potentiel est là selon Kevin, car « depuis l’histoire du Covid, on a vu beaucoup de personnes arriver de villes plus importantes et désireuses de trouver ou retrouver une vie plus saine. Beaucoup d’entre elles sont en activité et parmi elles, il y en a pas mal qui font du télétravail ». Une arrivée de personnes qui vient rajeunir la pyramide des âges de Ségur-le-Château et de ses alentours. Ainsi, sur un village de 180 habitants, une vingtaine de trentenaires sont arrivés ces 3 dernières années et cela continue.
Une tendance sur laquelle La Ruelle souhaite réfléchir afin de faire en sorte qu’une offre locative puisse se dessiner pour ces nouveaux arrivants. « Nous avons des gens qui ont les moyens d’acheter de vieilles et belles maisons et de la rénover mais il faut également pouvoir accueillir d’autres catégories de population pour une meilleure mixité sociale », précise Kevin. Ce pourrait l’objet d’une nouvelle coopérative « car dès qu’un bien est proposé à la location, il ne reste pas sur le marché. La demande est importante et c’est un mouvement de fond que l’on retrouve dans les autres villages autour de Ségur », dit-il.