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Citadelle de Blaye - D. Remazeilles  - Gironde Tourisme
Document stratégique

Diagnostic territorial de la Haute Gironde

Dans le cadre d’une politique territoriale solidaire et co-construite, la Région réalise des diagnostics territoriaux qu’elle partage avec les acteurs concernés pour mettre en évidence la capacité des territoires à se développer et à capitaliser sur ce potentiel.

Revenus captés, dynamiques du tissu économique, attractivité, niveau de cohésion sociale, niveau de formation de sa population, accessibilité aux services de la vie courante… tous ces éléments sont analysés pour aboutir à une stratégie de développement et un plan d’actions adaptés aux spécificités locales.

Un territoire sous forte influence de la métropole bordelaise

Situé à l'extrême nord du Département de la Gironde, sur la rive droite de l’estuaire, entre la métropole bordelaise, la CA du Libournais et la Charente- Maritime, le territoire de contractualisation de Haute Gironde se compose de 4 EPCI (les communautés de communes de l’Estuaire, de Blaye, du Grand Cubzaguais et la CC Latitude Nord Gironde). En 2015, ses 63 communes comptent 89 110 habitants.

La Haute Gironde est sous très forte influence de la métropole puisque 68 % de sa population réside dans la couronne périurbaine bordelaise. Le principal pôle, celui de Saint-André-de-Cubzac, avec 22 340 habitants et 5 570 emplois, est lui-même intégré à la couronne périurbaine bordelaise. Le territoire comporte un second pôle structurant, celui de Blaye (10 376 habitants, 4 520 emplois). Ces deux pôles concentrent 41 % des emplois du territoire et constituent également des pôles d’équipement supérieur. En complément, 5 pôles d’emploi secondaires offrent de 1 000 à 3 000 emplois chacun. Quatre d’entre eux sont des pôles d’équipement intermédiaire qui animent des bassins de vie.

La Haute Gironde bénéficie d’une position géographique privilégiée. Des infrastructures de transport routier et de fret structurantes lui assurent une bonne desserte à courte et longue distance. Les axes majeurs de communication nord/sud qui la traversent (A10 et N10), lui offrent une relative proximité avec les agglomérations de Bordeaux, de La Rochelle et d’Angoulême et l’ouvrent vers Paris. La proximité de l’agglomération de Libourne offre aussi une ouverture vers Brive, Clermont-Ferrand et Lyon via l’A89 et l’aéroport de Bordeaux-Mérignac l’accès à des vols intérieurs et internationaux. Enfin, l’est du territoire est irrigué par la ligne TER Bordeaux – Saintes et Blaye dispose de l’un des terminaux céréaliers et vraquiers du port de Bordeaux.

Un modèle de développement en mutation, qui engendre une captation limitée de revenus

La Haute Gironde dispose d’un modèle de développement de type « productif- public-social-retraite-pendulaire » mis en évidence par une surreprésentation de ces cinq bases dans le processus de captation de revenus en provenance de l’extérieur, comparativement à la moyenne des territoires périurbains de comparaison1. La multiplicité de ces composantes traduit une recomposition en cours des modalités de fonctionnement socio-économique du territoire qui s’accompagne d’une dépendance fragilisante aux mécanismes de redistribution nationaux (transferts sociaux, pensions de retraite, revenus publics).

Les capacités productives exportatrices historiquement ancrées sur ce territoire de production viticole où s’est implanté un très gros employeur industriel, la centrale nucléaire du Blayais, restent un atout essentiel qui contribue à son dynamisme économique.

Malgré la préservation de ces capacités productives exportatrices, les transferts sociaux sont importants du fait d’une situation sociale très défavorable. La surreprésentation des pensions de retraite et des revenus publics dans le processus de captation de revenus résulte davantage d’un déficit général de captation de revenus que des caractéristiques démographiques du territoire ou de la place de la sphère publique dans l’économie locale. La population est en effet rajeunie par la très forte attractivité du territoire, comme on le verra plus loin, et le poids des emplois publics s’avère limité.

Le modèle de développement s’appuie aussi fortement sur un mouvement de « résidentialisation » plus porteur sur un plan socio-économique, engendré par la montée en puissance des revenus pendulaires. Le positionnement résidentiel de la Haute-Gironde, aux portes de la métropole bordelaise, génère en effet un important apport de revenus importés par les 17 000 actifs qui résident sur le territoire et travaillent à l’extérieur. 69 % d’entre eux occupent un emploi au sein de Bordeaux métropole, 14 % dans la CC du Secteur de Saint Loubès ou la CA du Libournais. Les revenus pendulaires deviennent le principal moteur de développement, ce qui ne manque pas d’interroger la durabilité de ce modèle, qui engendre des effets secondaires néfastes : forts  impacts  environnementaux (71 % des émissions de gaz à effet de serre du territoire sont produites par les transports) et important risque de précarité énergétique. Cette mobilité subie se double d’effets sociaux importants : la Haute-Gironde est un territoire où les « gilets jaunes » se sont fortement mobilisés.

Les revenus touristiques, autre moteur résidentiel, sont largement sous- représentés comme dans la plupart des territoires périurbains de la métropole bordelaise, hormis le Médoc. Malgré de véritables atouts touristiques (patrimoine naturel riche, position de choix qu’offre l’estuaire et la résonance possible avec le Médoc, patrimoine historique et architectural - citadelle de Blaye, châteaux - possibilités de développement de l’oenotourisme), la Haute-Gironde affiche une faible concentration d’hébergements touristiques marchands ou non marchands. L’offre marchande en hôtels et campings est par ailleurs insuffisamment qualifiée.

En dépit de la place importante des revenus productifs exportateurs et des revenus pendulaires dans son processus de captation de revenus extérieurs, la Haute Gironde enregistre un potentiel de captation de revenus très inférieur à la moyenne des territoires périurbains entourant la métropole bordelaise. Ce déficit pèse sur le dynamisme de l’emploi présentiel. La densité en emplois présentiels reste en effet très faible. La Haute-Gironde fait partie des deux territoires périurbains entourant la métropole bordelaise pour lequel la propension à consommer localement est la plus faible, ce qui laisse supposer un phénomène relativement important d’évasion commerciale. Au global, le système de redistribution des revenus captés dans l’économie locale apparaît relativement défaillant.

Une économie à dominante productive qui témoigne d’une forte vitalité

Le tissu économique haut girondin a enregistré, comme partout, une véritable mutation depuis les années 70. Doté d’une orientation résolument productive en 1975, il conserve ce profil mais de façon moins affirmée. Ainsi, la sphère productive, alors qu’elle concentrait 55 % des emplois en 1975, n’en représente plus que 36,7 % en 2015. Davantage représentée qu’en province (34 %), elle reste un pilier essentiel de l’économie, tout en laissant une place plus importante à la sphère présentielle, tournée vers la satisfaction des populations résidentes et des touristes. Ces mutations résultent d’une explosion de l’économie présentielle qui, initialement en fort retrait, amorce un rattrapage. Elle s’est en effet développée à un rythme plus soutenu que dans les territoires périurbains bordelais, deux fois plus rapide que dans la région et au niveau national. Si le poids de la sphère productive a diminué, le nombre de ses emplois a progressé entre 1975 et 2015, contrairement aux tendances régionales et nationale. Cependant ce nombre d’emplois croît à un rythme nettement moindre qu’en moyenne dans les territoires périurbains bordelais. La Haute-Gironde a probablement moins bénéficié que la plupart d’entre eux du desserrement géographique de ces activités.

Le tissu économique local est fortement spécialisé dans deux secteurs relevant de la sphère productive : la production et distribution d’énergie qui représente 9,8 % de l’emploi salarié (la centrale nucléaire du Blayais à elle seule emploie près de  1 300 agents) et l’agriculture auxquels s’ajoute une spécialisation moins marquée dans une autre activité industrielle, réparation et installation de machines. Quatre spécialisations dans des activités majoritairement présentielles ressortent: le commerce-réparation automobile, l’enseignement, la construction, les activités juridiques, comptables et de gestion.

L’agriculture concentre, comme dans les territoires périurbains bordelais, près de 10,7 % des emplois du territoire en 2015 (contre 5,2 % en Nouvelle-Aquitaine). A forte orientation viticole avec ses AOP Côtes de Bourg et Blaye Côtes de Bordeaux, elle se distingue aussi par la culture de l’asperge et une IGP associée. L’agriculture locale est confrontée à une diminution de ses emplois deux fois plus marquée que dans la région entre 2010 et 2015 (- 15,7 %) et à un vieillissement avancé des agriculteurs exploitants qui alerte sur la question de la transmission des exploitations : en 2015, 54,4 % des exploitants sont âgés de plus de 50 ans sur le territoire, c’est 2 points de plus qu’en Nouvelle-Aquitaine.

La dynamique soutenue des deux sphères sur le long terme se traduit par une forte vitalité économique, qui se confirme sur la période récente. Après avoir subi les effets de la crise financière sur la période 2008-2009, la Haute Gironde s’est ensuite relevé en tirant profit des périodes de reprise 2009-2011 et 2014-2017 et en continuant à gagner des emplois salariés lors de la phase récessive 2011-2014. Sur l’ensemble de la période 2008-2017, la dynamique a été très soutenue (+10,0%, soit 1 100 emplois salariés créés au total), cependant moins qu’en moyenne dans les territoires périurbains bordelais. Ces gains d’emploi s’expliquent pour plus de moitié par l’orientation sectorielle favorable du tissu économique local. La dynamique est aussi due pour une part significative à « un effet local » positif. En effet, si chacun des secteurs d’activité présents sur le territoire avait évolué comme au niveau national, la progression de l’emploi salarié n’aurait été que de +5,9 %, au lieu des +10,0 % observés. L’ampleur de l’effet local peut être ici liée à la capacité des acteurs à travailler ensemble, à innover, comme à la formidable poussée démographique qui engendre un développement accéléré de l’économie présentielle. La dynamique de création d’établissements reste par ailleurs vivace comme en attestent le taux de création d’établissements et le niveau de renouvellement du tissu économique.

Une situation sociale préoccupante et des disparités territoriales

La forte dynamique économique de la Haute-Gironde ne suffit pas à assurer une situation sociale favorable. Le fait que le territoire est insuffisamment pourvoyeur d’emplois en explique probablement une bonne part. En 2015, il compte 42 800 actifs pour 24 300 emplois, soit un ratio de 176 actifs pour 100 emplois qui met en lumière un déséquilibre criant. Bien que des flux intenses d’actifs aillent travailler hors du territoire (17 000), sensiblement plus étoffés que les flux d’actifs extérieurs qui viennent travailler dans le territoire (4 500), ils ne suffisent pas à résoudre le déficit numérique d’emplois pour les actifs résidents. Et ces flux ne pourront s’accroître indéfiniment au regard du renchérissement des coûts de déplacement et des impacts environnementaux.

La situation sociale est préoccupante à divers titres. Le chômage est très élevé et affecte particulièrement les femmes. Cependant, entre 2010 et 2015, il progresse à un rythme moins soutenu qu’en moyenne dans l’ensemble des territoires de comparaison malgré un accroissement plus marqué de la population active.

Le niveau de vie des ménages est sensiblement inférieur à celui qui est observé dans les territoires de comparaison et cela quel que soit la catégorie de ménages, des classes les plus défavorisées aux plus aisées. Cette faiblesse généralisée du niveau de vie limite la consommation locale, et le développement de l’économie présentielle. Les situations de pauvreté sont répandues : elles touchent 14,4 % des ménages en 2015.

Le niveau de qualification de la population est bas, avec une forte surreprésentation de population ne disposant pas d’un diplôme qualifiant et une nette sous-représentation des diplômés du supérieur. Point positif, le niveau de qualification progresse entre 1999 et 2015, plus rapidement qu’en moyenne dans tous les territoires de comparaison. La précarité de l’emploi reste relativement modérée.

La CC du Grand Cubzaguais, la plus attractive et qui adresse les flux d’actifs les plus fournis vers la métropole bordelaise, dispose d’une situation sociale sensiblement plus favorable. Les territoires situés plus au nord et le long de l’estuaire, sont globalement plus touchés par le chômage, la pauvreté et un moindre niveau de qualification. Ces territoires se distinguent aussi par un état de santé en-deçà de la moyenne régionale avec un taux de mortalité et des prévalences d’affections longue durée élevés.

Une attractivité démographique soutenue à accompagner

La Haute Gironde a connu depuis 1975 une croissance continue de sa population particulièrement accélérée depuis les années 2000. Ce dynamisme démographique résulte d’un solde migratoire très soutenu qui influe progressivement aussi sur le solde naturel, les nouveaux arrivants étant très majoritairement de jeunes ménages. Ainsi le solde naturel, positif, ne cesse de croître. Il est d’ailleurs supérieur à celui des territoires périurbains de la métropole bordelaise.

Ainsi, la population de la Haute Gironde est jeune. Les moins de 30 ans (35 % de la population) sont beaucoup plus nombreux que les seniors de 60 ans ou plus (23,6 % des habitants) et les jeunes actifs sont bien représentés.

L’attractivité du territoire se traduit sur la période récente par une accélération du renouvellement du parc de résidences principales et une importante consommation d’espace (0,12 hectare par habitant supplémentaire entre 2009 et 2015). La Haute Gironde est également confrontée à une hausse du prix de l’immobilier, bien que le marché local reste plus accessible que dans la plupart des territoires de comparaison. Le niveau d’équipement du territoire a du mal à suivre l’afflux de populations nouvelles. Plutôt bien doté en équipements de la gamme supérieure, il pâtit d’un faible niveau d’équipements les plus courants (gamme de proximité et surtout gamme intermédiaire) par rapport aux territoires de comparaison, en particulier en matière de commerces et d’équipements de santé, ce qui entretient un phénomène d’évasion commerciale.

Des pistes d'enjeux

Le modèle de développement de ce territoire dynamique sur un plan démographique et économique pourrait paradoxalement devenir de plus en plus socialisé. Dans la perspective du renchérissement des coûts de transport, la précarité énergétique constitue notamment une menace au regard des revenus modestes des ménages et de leur dépendance très forte à la métropole en termes d’emplois. Le déficit d’emplois en Haute-Gironde appelle un développement endogène, une meilleure maîtrise de la dynamique d’accueil et un développement plus équilibré du territoire au sein des pôles qui le structurent. Tout en s’appuyant sur les forces que représentent aujourd’hui les capacités productives, il convient d’anticiper leurs évolutions et de développer l’économie résidentielle. Ces mutations appellent une adaptation des compétences et un souci d’insertion des populations les plus éloignées de l’emploi.

  1. Consolider et diversifier le levier productif : la Haute-Gironde, si elle a su maintenir ses emplois productifs, se trouve face à plusieurs défis à venir. La question du devenir de la centrale nucléaire, le plus gros employeur du territoire, se doit d’être posée. Ce territoire agricole, à proximité de l’important bassin de consommation métropolitain, aurait un bénéfice à tirer de la mise en place d’un projet alimentaire territorial. Le tissu de TPE doit quant à lui être accompagné dans sa croissance.
  2. Développer l’économie présentielle pour contribuer à diversifier le modèle de développement et pour soutenir la consommation locale : Des marges importantes de développement existent dans ce territoire très dynamique démographiquement. C’est ce que traduit la faible densité d’emplois présentiels et le déficit d’équipements et de services qui occasionnent aujourd’hui une forte évasion commerciale. D’autre part, la Haute-Gironde dispose d’aménités touristiques importantes, propices à transformer une partie du tourisme d’excursion en tourisme de séjour et à stimuler ainsi la consommation locale. Le développement des équipements et services est à coordonner avec un renforcement des centres-bourgs.
  3. Maîtriser, pour ce territoire sous influence métropolitaine, les effets environnementaux et sociaux négatifs induits par son attractivité. Il convient de limiter la consommation foncière et l’artificialisation des sols, comme de réduire les émissions de gaz à effet de serre et les risques de précarité énergétique notamment dûs aux déplacements quotidiens. Favoriser des solutions de mobilité décarbonées à moindre coût pour les ménages est un enjeu fort sur ce territoire. Les possibilités que peuvent offrir les dessertes fluviales sont notamment à étudier. Une gestion régulée des déplacements n’a de sens que dans le cadre d’une coopération renforcée avec la métropole sur les questions de mobilité et de politique d’accueil. Au- delà, il s’agit de positionner le territoire comme espace d’équilibre dans l’espace métropolitain, aux côtés du Libournais.
  4. Accompagner l’adaptation des compétences, la montée en qualification de la population et son insertion : La bonne trajectoire économique du territoire est en contradiction avec une situation sociale défavorable. Ce déséquilibre préoccupant peut être en partie gommé par une fluidification du marché du travail local ainsi que par une attention particulière accordée aux questions d’inclusion et d’insertion. Bénéficiant d’une offre de formation diversifiée ainsi que de politiques volontaristes (Centre de formation multi-métiers), la Haute-Gironde dispose d’atouts à faire valoir. La mobilisation des acteurs de l’ESS, actuellement sous- développée sur le territoire, constitue une piste intéressante.
  5. Coopérer et faire vivre une gouvernance supra-communautaire efficiente sur les sujets transversaux identifiés
Poids des revenus productifs et sociaux captés par le territoire - 1 – Haute Gironde
Poids des revenus productifs et sociaux captés par le territoire - 1 – Haute Gironde
Poids des revenus productifs et sociaux captés par le territoire - 2 – Haute Gironde
Poids des revenus productifs et sociaux captés par le territoire - 2 – Haute Gironde
Sphère présentielle et dynamique de l'emploi – Haute Gironde
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Niveaux de qualification de la population - Haute Gironde
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Démographie : Evolution de la population – Soldes naturel et migratoire - Haute Gironde
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