A Lacq, l’arrêt de l’exploitation commerciale du gaz a soulevé des craintes mais a finalement débouché sur un nouvel horizon, celui de la transition énergétique et de la chimie verte. Portée par le GIP Chemparc et la plateforme Chemstart’up, c’est tout un bassin industriel qui relève les défis du 21e siècle.
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Découvrir le plus grand gisement de gaz de France change forcément le destin de tout un territoire. Après avoir trouvé du pétrole en 1949 sur la commune de Lacq, les recherches aboutissent deux ans plus tard au jaillissement du gaz. Dès 1957, l’exploitation de cette ressource naturelle transforme totalement le paysage socio-économique local.
Arrivée de grandes entreprises nationales (Total, Arkema, Sanofi…), création d'emplois, construction de bâtiments… le territoire prospère grâce à cette découverte. Tout près de là, une ville nouvelle, Mourenx, voit le jour pour loger la main-d'œuvre travaillant sur le site. Le pic d’activité se situe en 1982, année de production record avec 12 milliards de m3/an de gaz. Mais après l’âge d’or, vient le temps des inquiétudes.
Des outils pour accompagner la reconversion
A la fin du 20e siècle, on comprend que la ressource naturelle ne sera pas éternelle. “Cela a généré un fort mouvement social à la fin des années 1990, car les ouvriers craignaient la fin de l’exploitation”, se souvient Patrice Bernos, directeur du GIP (groupement d’intérêt public) Chemparc. Cette entité est issue directement de cette période de crise. “A cette époque, un comité interministériel s’est tenu à Paris avec la nomination d’un sous-préfet à la réindustrialisation pour la reconversion du bassin”. C’est ainsi que Chemparc a été créé avec trois missions principales.
La première est de promouvoir le bassin, la deuxième consiste à y attirer des projets et enfin, il accompagne les entreprises dans leur installation et développement sur le site. “Nous avons participé à de nombreux salons spécialisés à l’étranger et nous avons réalisé de multiples missions dans des pays comme l’Inde, le Canada, les Etats-Unis…” raconte l’homme fort du GIP. “Pour vendre le territoire et le faire connaître, je parle de Biarritz, de Lourdes et je dis que nous sommes entre les deux, tout le monde connaît ces deux villes au niveau international”.
© Chemparc
La plateforme Chemstart’up
Créé en 2003, Chemparc a connu une autre dimension avec la construction en 2011 de la plateforme Chemstart’up. Un bâtiment de 2 500 m² divisé en huit modules à même d’accueillir des jeunes pousses œuvrant dans le domaine de la chimie verte. Le succès étant au rendez-vous, des extensions successives ont été nécessaires, la dernière date de mai 2022 avec la construction de trois nouveaux bâtiments pour accompagner les développements de trois entreprises.
“Portée par la communauté de communes Lacq-Orthez (CCLO) et le GIP Chemparc, la plateforme technologique Chemstart’up s’est de nouveau agrandie, pour la troisième fois depuis son ouverture. Composé de laboratoires et halls techniques très spécifiques et sécurisés, ce nouvel ensemble accueille les trois sociétés dans trois bâtiments distincts”, détaille Marlène Hayet, directrice générale adjoint du pôle économique de la CCLO.
Un premier bâtiment de 1 637 m² est occupé par Arkema, acteur mondial de la chimie de spécialités. Le second de 556 m² héberge Canoe, centre de recherche et développement unique en France dans le domaine des composites et matériaux avancés. Enfin, le dernier immeuble de 1 529 m² abrite M2i, leader européen dans la protection biologique des plantes par phéromones. Cette dernière structure est d’ailleurs un parfait exemple du développement qu’une société peut connaître sur le site Chemstart’up. Née en 2013 à Lacq avec 9 salariés, M2i réalise aujourd’hui 28 M€ de chiffres d’affaires et emploie 250 personnes sur plusieurs sites en France. Malgré leur marché international, toute la production est faite dans l’hexagone et toute la R&D pour l’ensemble du groupe est basée sur le site béarnais.
© Chem'startup
De l’énergie fossile à la chimie verte
Cette extension porte à 90 le nombre de salariés travaillant sur la plateforme Chemstart’up, répartis dans une dizaine d’entreprises. Le chantier de 4,4 M€ a été financé par plusieurs structures (État, Europe, collectivités territoriales…), parmi lesquelles la Région à hauteur de 900 000 €.
A peine un peu plus d’un an après la livraison de ces nouveaux bâtiments, Patrice Bernos pense déjà au coup suivant. “Nous avons actuellement beaucoup de demandes de start-up pour intégrer notre plateforme, or nous sommes complets”, déplore-il. Une nouvelle extension est déjà en cours de préparation pour continuer le développement de Chemstart’up et ainsi poursuivre la reconversion de tout un bassin. Hier tourné sur l’énergie fossile, le site de Lacq se spécialise aujourd’hui vers les enjeux de demain, ceux de la chimie verte, durable et éco-responsable. Un défi que tout un territoire est en passe de réussir.
“La volonté de réindustrialisation du pays, couplée à la transition énergétique nous apporte des projets qui se chiffrent désormais en centaines de millions d’euros et en centaines d’emplois”
“Au pic de l'exploitation, dans les années 1980, il y avait 8 500 emplois industriels sur le bassin, aujourd’hui nous en comptons 7 500”, expose le directeur de Chemparc. “On s’en sort plutôt bien, sans les destructions massives d’emplois comme ont pu connaître les bassins miniers ou ceux de la métallurgie”.
Des chiffres encourageants et qui devraient être en progression dans les années futures. “De nouveaux et gros projets viennent à nous dans le cadre du plan de relance France 2030”. Des dossiers qui donnent le sourire à Patrice Bernos tant les perspectives entraineraient de fortes retombées pour le territoire. “La volonté de réindustrialisation du pays, couplée à la transition énergétique nous apporte des projets qui se chiffrent désormais en centaines de millions d’euros et en centaines d’emplois”, se réjouit-il.
Des implantations futures perçues comme le fruit du travail accompli ces vingt dernières années pour la reconversion du bassin de Lacq. Un territoire qui, au fond, n’a pas changé sa mission (chimie et production d’énergie) mais qui a su s’adapter aux enjeux du monde d’aujourd’hui et de demain.